Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Galerie Haute
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Galerie Haute
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Galerie Haute
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Galerie Haute
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Galerie Haute
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Marthe et Jean-Marie Simonnet
Vue de l’exposition Les Simonnet
Galerie Haute
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy des artistes

Artistes : Les Simonnet / Commissaire : Éric Degoutte

En 2019 et 2020, alors que le centre d’art s’engageait sur une saison artistique qui allait s’intituler Figures, l’idée et l’envie d’y penser la présence des Simonnet se fit jour. Ce fut sans compter l’inracontable qui surgit alors, nous plongeant dans une stupéfaction collective, une suspension généralisée de nos formes de vie, dont certaines se démythifièrent brutalement en agitation quotidienne, celles d’un temps possiblement et incroyablement révolu. 

Alea jacta est. 

Les dés roulèrent, formant une ribambelle capricieuse dans une fuite éperdue des points, nos yeux lorgnant vers eux à la quête de certitude, de formes identifiables. Les chiffres n’en faisaient qu’à leur tête et, dans le développé du geste initial, trouvaient la force de s’entrechoquer, se succéder, tous distincts et pourtant tous liés dans une logique d’agencement méticuleuse. 

Et mathématique.

Finalement, il fallut rebattre les cartes un peu partout sur le globe.

Dans le registre des jeux ici nommés, il serait tout aussi juste d’évoquer, pour qualifier ce qui fut ressenti et se produisit, d’étape en étape, de vague en vague, dans une forme d’apparentement très subjectif et purement formel, plaisant et ludique, le déroulement d’une partie d’osselets. 

Moins stéréotypées que les formes géométriques précédemment évoquées, ces formes premières – puisqu’observables à l’os même d’une réalité teintée naturellement dans la masse – induisent elles aussi le déroulement d’une séquence saccadée, dans un geste à la fois mesuré et une maitrise de la main la plus constante possible face aux aléas de comportements de ces formes libres et éclatées. A cela s’ajoute, cette fois, un comptage silencieux et sous-jacent à l’activité en cours et qui présuppose la prochaine position de la main à venir, plus encore à tenir pour disposer des conditions de l’aplat qu’elle pourrait présenter, en regard de la densité de la force motrice qui soulève la matière, l’engage dans un basculement, un pivotement ou un retournement. Tout en pariant, ponctuellement sur son assise, sa stabilisation et sa déposition sur le plateau. 

1 et 2. Et 3. Puis 4. Les formes se regroupent.

Dans les meilleurs cas, les 5 petites modules osseux sont alignés hors du plateau de jeu. 

Cette petite suite mathématique, comme toute suite mathématique, invite à sa reconduction. 

Relancer les dés, relancer les osselets. Relancer la suite mathématique. Et dans cela peut-être rééprouver l’éternité en approche.

La prédominance de la main dans l’appropriation des réalités formelles est une réalité qui parcourt 50 ans de pratiques artistiques chez Marthe et Jean-Marie Simonnet. 

Le registre du jeu – formel, géométrique, symbolique – plane dans leurs approches, prolongeant dans le registre des échelles, une dynamique en capacité de tutoyer l’infini : une même continuité s’y perçoit dans le développement du geste, de l’objet au mobilier, du monument sculptural aux architectures réduites (espaces de jeu pour enfant). Ce tutoiement de l’infini relève de la suspension à voir se produire la poésie d’un déployé (la main) ou d’un déploiement (les modules, les empilements, les emboitements et les variations ou encore les formes d’un cerf-volant se structurant par la force du vent). 

Tout est question d’allure. 

Le double sens du terme invite à mieux en rendre compte.

D’abord, l’allure comme forme et figure mathématique : l’histoire de la pensée mathématique recouvre celle de sa formulation et de son expression « physique » dans le champ des espaces de leur représentation (depuis l’antiquité, dans l’exubérance des modules de plâtre des facultés de mathématiques jusqu’au XIXe siècle et encore de nos jours, parsemant le spectre des formes de design génératif, de représentations fractales ou des modalités fonctionnelles des blockchains…). 

De ce besoin de projection d’un énoncé mathématique dans un rapport à l’espace sont issues des formes et des figures dont nombre de pièces des Simonnet portent la trace. Cette présence fantomatique est résurgence depuis leurs premières formes dispersées dans la forêt de Fontainebleau, certaines cours d’école bruissantes de cris d’enfants, et dans la sérialité des polymorphes réguliers composés de sinoblocs. 

Cette régularité de présence dissimulée est telle qu’elle se fait parfois jusqu’à l’oubli pour Marthe et Jean-Marie Simonnet, ravis de se retrouver dans le même temps découvreurs d’une visibilité construite et archéologues des principes qui la motive.

Le registre du jeu déborde la forme dans un dépassement qui relève autant d’une sublimation, d’une exaspération que d’une dispersion. 

Les reliefs infinis ou illimités, engagés il y a plus de 30 ans, et dont les toutes dernières formes ont été réalisées pour l’exposition en sont une élégante expression. Marthe dirait qu’au terme de cette mise en jeu, le féminin se fait le prolongement du masculin devenu lui-même prolongement du féminin : si les formes modulaires produites s’emboitent et s’épousent – clin d’œil au couple d’artistes, à 50 ans de création artistique menée à 4 mains – pour former un hexaèdre régulier, possiblement clos sur lui-même remplissant tout l’espace sans laisser de vide entre les pièces identiques le composant, dès lors qu’elles s’ouvrent, la possibilité d’un infini se déploie dans une promesse sans limite, et dans un rythme qui fonde l’autre sens du terme allure.

Car le jeu des formes s’opère à belle allure.

A la figure de l’équidé – pour qui les sens doubles de l’allure (physionomie et déplacement) semblent avoir été ciselés – celle des équipartitions des Simonnet se fait figure de Troie, ouvrant le champ vers des réalités emboitées.

Ainsi observée, l’allure, sans préjuger du sens qui s’y manifeste (forme ou rythme) est une forme ouverte. 

L’allure est une forme de vie de la forme.

Il est possible de dire que c’est une donnée principielle pour les Simonnet. 

L’investigation (forme, espace, échelle) se fait par le jeu, consciente de la richesse des promesses qui s’opèrent dans les combinaisons, sans entrevoir plus avant – dans l’apriori – les choses, en s’appuyant sur le développé du geste, l’expression de la main concrétisant ce qui n’était encore un instant qu’une rêverie constructive.